Cinq questions à Me Francis Dako
Maître Francis Dako (*) Coordonnateur du Bureau Francophone Afrique de la Coalition pour la
Cour pénale internationale
1. Pouvez vous présenter la Coalition pour la Cour pénale internationale?
La Coalition pour la C P I est un réseau mondial de plus de 2.000 ONG de toutes les régions du monde travaillant depuis 1995 en faveur d'une CPI efficace, juste et indépendante. Son secrétariat international est actuellement basé à New York (USA) et à la Haye (Pays-Bas). En Afrique, nous avons deux points focaux, l'un couvre l'Afrique anglophone et l'autre concerne l'Afrique francophone. Dans chaque pays, nous essayons d'organiser les groupes de la société civile dans un creuset organisationnel qui prend la dénomination de Coalition nationale avec une autonomie financière et organisationnelle. La RDC dispose d'une seule Coalition dénommée Coalition Nationale pour la CPI, CN- CPI en sigle, que coordonne M. Christian Hemedi.
2. eut-on savoir l'objet de votre mission en RDC ?
Je suis porteur d'un message de la Coalition pour la Cour pénale Internationale aux autorités congolaises relative à certaines préoccupations touchant a l'effectivité de la CPI en RDC. Il s'agit de plaider d'une part, pour une adaptation de la loi de mise en oeuvre du Statut de Rome en RDC et d'autre part pour le dépôt des instruments de ratification de l'Accord sur les privilèges et immunités de la Cour. La RDC est partie prenante au Statut de Rome de la CPI pour avoir ratifié ce traité le 11 avril 2002. Or, le principe cardinal du Statut de Rome est sa complémentarité avec les juridictions nationales. La RDC se devait donc d'adapter sa législation aux règles et normes du Statut de Rome de la CPI en vue de permettre une coopération pleine et entière avec la Cour dans les enquêtes et les poursuites mais également pour permettre aux juridictions congolaises de poursuivre et juger les auteurs et complices d'infractions graves qui ont endeuillé le peuple congolais depuis juillet 2002. Il faut reconnaître que sous l'impulsion de la Coalition nationale de la RDC pour la CPI, des progrès importants ont été enregistrés dans le processus d'internisation du Statut de Rome. Le projet de loi est présentement sur les bureaux du président de l'Assemblée nationale à titre de matière résiduelle de la transition. L'adoption de cette loi permettra au pays de se doter d'un instrument important dans la lutte contre l'impunité sur le plan national et international. L'autre volet de ma mission est de plaider le dépôt des instruments de ratification de l'Accord sur les privilèges et immunités de la Cour. Il s'agit d'un accord important qui organise les termes dans lesquels la Cour jouit sur le territoire des États-Parties des privilèges et immunités nécessaires à l'accomplissement de sa mission. J'aurais ensuite diverses réunions d'échanges d'informations et de stratégies avec les acteurs de la société civile sur l'effectivité de la Cour en RDC.
3. Pensez-vous aussi que l'effectivité de la Cour passe par des activités de sensibilisation ?
Le travail de sensibilisation et d'informations publiques pour faire connaître un organe jeune ayant mandat de juger les auteurs et complices de crimes internationaux est toujours important et doit être fait de façon continue avec tous les acteurs concernes. La Cour elle-même fait un travail important en ce sens à travers l'unité de sensibilisation du Bureau de la Cour pénale internationale basée à Kinshasa. La Coalition, pour sa part, poursuit au quotidien son travail de sensibilisation sur la Cour, d'information sur les développements récents au niveau de la Cour et de formation continue dans un souci de proximité et de vulgarisation de la Cour aux moyens de conférences publiques, de communiqués de presse d'information dans les médias et d'émissions interactives.
4. Pourquoi c'est seulement maintenant que la CPI ouvre une enquête en République centrafricaine ?
Il est exact que le 22 mai 2007, le Procureur de la Cour pénale internationale (ICC) Luis Moreno-Ocampo a annoncé l'ouverture d'une enquête formelle sur la situation en République centrafricaine (RCA), suite au renvoi de la situation par les officiels de la RCA le 7 janvier 2005. Au cours de cette annonce publique le Procureur a indiqué clairement qu'il estimait que « des crimes graves relevant de la compétence de la Cour ont été commis en RCA ». Il faut comprendre que le mécanisme est assez complexe. Il s'agit d'une juridiction internationale qui traite de crimes graves touchant à la liberté individuelle des gens. Alors le mécanisme prévu par les Etats fondateurs n'autorise aucun travail expéditif ni politiquement motivé. Suite au renvoi de la situation par le gouvernement de la RCA, il fallait d'abord que le Procureur examine les informations fournies par diverses sources et conclure qu'il existait des motifs valables de croire que des crimes relevant de la compétence de la Cour ont été commis en RCA. Si le Procureur décide qu'il existe des motifs valables justifiant l'ouverture d'une enquête, il en notifie les Etats parties puis procède à une annonce publique.
5. Quand est-ce que l'on connaîtra les noms des premiers suspects dans cette affaire?
Le Procureur doit mener une enquête sur tous les faits et preuves pertinents à l'évaluation de la responsabilité pénale individuelle, y compris des preuves à charge et a décharge tout en tenant constamment compte des intérêts des victimes et témoins et les droits des personnes faisant l'objet d'enquêtes. ..Bref, le chemin est encore long pour connaître les noms des premiers suspects en cette affaire.
(*) Coordonnateur du Bureau Francophone Afrique de la Coalition pour la Cour pénale internationale.
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