Trois officiers français témoignent en faveur d'un colonel rwandais

Publié le par LE MONDE

Trois officiers français témoignent en faveur d'un colonel rwandais

rois officiers français ont témoigné cette semaine en faveur d'un colonel de l'ex-armée rwandaise, Gratien Kabiligi, poursuivi pour génocide, crimes contre l'humanité et violations des conventions de Genève, par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Les trois témoins sont d'anciens acteurs de l'opération "Turquoise", conduite par l'armée française du 22 juin au 22 août 1994, pendant et après le génocide perpétré au Rwanda au cours duquel près de 800 000 Tutsis et Hutus de l'opposition avaient été massacrés.

Le commandant de l'opération, le général Jean-Claude Lafourcade, et les généraux Jacques Hogard et Jacques Rosier - colonels à l'époque des faits - ont témoigné à huis clos, en présence de représentants de l'Etat français et par vidéoconférence depuis La Haye.

HUIS CLOS DEMANDÉ PAR PARIS

Des soldats français arrêtent trois Hutus rwandais lors de l'opération "Turquoise" au Rwanda, le 3 juillet 1994. | GAMMA/QUIDU NOELOuvert en avril 2002, ce procès met en accusation le colonel Théoneste Bagosora, ancien chef de cabinet du ministère de la défense, considéré par le parquet comme le " cerveau du génocide", Gratien Kabiligi, ex-chef des opérations, le colonel Aloys Nsengiyumva et le major Aloys Ntabakuze, ancien chef des paracommandos. Au cours d'une audience, en décembre 2006, l'avocat de Gratien Kabiligi, Paul Skolnik, avait expliqué que, suite à la rupture des relations diplomatiques entre la France et le Rwanda, le 24 novembre, Paris ne souhaitait pas que ses soldats se déplacent à Arusha (Tanzanie), où siège le TPIR. Un autre officier français, le colonel Grégoire de Saint-Quentin, a déjà comparu le 1er décembre dans des conditions similaires. Dans le même procès, l'avocat de Théoneste Bagosora, Raphaël Constant, qui souhaitait appeler le colonel Jean-Jacques Maurin, adjoint à l'attaché de défense de l'ambassade de France à Kigali en 1994, a rejeté les mesures acceptées par le tribunal à la demande de la France (huis clos et vidéoconférence) et renoncé à la comparution.

L'opération "Turquoise" de 1994, qualifiée d'humanitaire par Paris, et mise en place sous l'égide des Nations unies, fait toujours l'objet de controverses. En octobre dernier, Kigali, qui estime que l'opération visait à protéger les responsables du génocide repoussés par les rebelles aujourd'hui au pouvoir, a ouvert une commission chargée d'enquêter à charge sur le rôle de la France dans le génocide.

En novembre, le juge antiterroriste Jean-Louis Bruguière a émis des mandats d'arrêt contre plusieurs officiers de l'actuel état-major de l'armée rwandaise et a demandé au Conseil de sécurité de l'ONU de saisir le TPIR pour la responsabilité présumée de l'actuel président Paul Kagamé, dans l'attentat perpétré contre son prédécesseur, Juvénal Habyarimana, le 6 avril 1994, considéré comme l'élément déclencheur du génocide.

Stéphanie Maupas
Article paru dans l'édition du 19.01.07

Publié dans L'AFRIQUE

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